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Marios Georgiou sacré champion d'Europe à Rimini, pas de miracle pour les Français

Marios Georgiou, ici aux Internationaux de France en 2022. (V. Joly/Presse Sports)
Marios Georgiou, ici aux Internationaux de France en 2022. (V. Joly/Presse Sports)

Le Chypriote Marios Georgiou (26 ans) a décroché le dernier quota olympique et, surtout, le titre de champion d'Europe à l'issue du concours général, ce mercredi à Rimini (Italie). Les Français obtiennent trois finales par agrès.

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Que les généralistes français ne nourrissent aucun regret : il fallait obtenir un total de 84,265 points pour espérer s'adjuger l'ultime quota olympique et gagner le droit de disputer les Jeux de Paris. Aucun n'en avait les moyens, d'autant que Léo Saladino (21 ans) a connu une entame compliquée avec deux chutes sur ses deux premières rotations aux barres parallèles et à la fixe.

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« Je savais qu'une erreur pouvait arriver. Mais, au premier agrès, en fin de mouvement, ça fait mal, avoue le jeune homme. Après, je me suis peut-être trop mis la pression pour rattraper ça à la fixe. Malheureusement, je fais une 2e chute. Je me suis dit que pour le ticket (olympique), c'était mort. Mais je n'ai rien lâché. Je me suis mobilisé pour l'équipe. » Au final, il termine à la 23e place avec 80,099 points, et Jim Zona à la 28e place avec 79,132 points.

Premier titre au concours général pour Chypre

L'homme qui valide le précieux sésame pour Paris est le Chypriote Marios Georgiou, un gymnaste à la trajectoire chaotique mais au talent déjà reconnu, qui offre à son pays le premier titre continental au concours général. Il devance l'Ukrainien Oleg Verniaiev et l'Italien Yumin Abbadini, qui ne succédera donc pas encore à son illustre compatriote Franco Menichelli, le seul à avoir été sacré en 1965. Quant au vice-champion du monde ukrainien Illia Kovtun, il a chuté deux fois au sol, sur des doubles saltos avant, avant d'escamoter sérieusement sa sortie aux arçons (6e).

« Je suis heureux ! Heureux du résultat, heureux de mes coéquipiers (Chypre se qualifie pour la finale par équipe prévue dimanche), réagit ce jeune homme absolument solaire. Et soulagé surtout ! C'était vraiment stressant. Ce titre me montre que, les jours où vous n'êtes vraiment pas bien, il faut persévérer et revenir le lendemain en y croyant. »

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Dans sa tête, le titre individuel n'était pas une option, il chassait juste le quota pour disputer ses troisièmes Jeux Olympiques. « Il y a deux ans, personne n'aurait imaginé que je serais là après mon opération de l'épaule (droite, en novembre 2022) », rappelle celui qui a été entouré par le staff, mais aussi guidé par le Grec Elefthérios Petrounias, « un expert en épaule » rit Georgiou à propos du champion olympique (2016) et triple champion du monde aux anneaux, qui fut opéré peu avant les Jeux de Tokyo (3e).

Repéré à trois ans au jardin d'enfants

Si la victoire du Chypriote, qui s'entraîne huit heures par jour, peut sembler inattendue, elle récompense un athlète qui fut déjà médaillé de bronze européen au concours général en 2019, derrière les Russes Nikita Nagorniy et Artur Dalaloyan, mais aussi champion d'Europe à la barre fixe en 2022. D'ailleurs, la gym a toujours été une boussole pour ce gamin de Limassol. « Sans elle, ma vie aurait été un gâchis », dit-il.

Après ses premiers succès internationaux en 2018, il avait obtenu que le gouvernement achète de nouveaux agrès pour son gymnase, obtenu des financements pour effectuer des stages en Grèce, patrie d'origine de son coach de toujours, Panagiotis Petridis, qui l'a repéré au jardin d'enfants, alors qu'à 3 ans, il était suspendu aux branches d'un arbre. Tout juste y eut-il une interruption quand l'adolescent rebelle a tourné le dos au sport pendant quelques mois pour traîner avec une bande de délinquants.

Il avait dix ans quand ses parents, un Chypriote et une Philippine, ont divorcé, le laissant livré à lui-même. « Je n'ai jamais été soutenu par ma famille », glisse celui qui souffrait de dyslexie. Une jeune âme sensible et vulnérable, qui était harcelée à l'école, sans jamais être réconfortée à la maison. Sa mère l'a abandonné en 2016, juste avant les Jeux de Rio, son père l'a recueilli mais les deux se disputaient sans cesse jusqu'au 27 mars 2017, et le décès d'une crise cardiaque de l'ancien chauffeur de taxi. « Je regrette tellement d'avoir été si rude avec lui », déplore le fils qui a tatoué cette date sur son poignet gauche, et sa vie en symboles maoris sur tout son bras droit. Depuis, Marios Georgiou construit doucement sa propre histoire.

Trois finales par agrès pour les Français

Forcément, son sourire tranche avec les mines des gymnastes français. Même s'ils n'ont pas démérité à Rimini, compte tenu des circonstances, des quatre blessés qui ont dû successivement être remplacés. Malgré quelques scories, le quintette affiche un total de 244,561 points. C'est mieux que celui de la 19e place mondiale de l'automne dernier (242,362 pts), mais cela les situe seulement à la 11e place européenne.

Les deux novices, Alexis Blin et Axel Brèche, ont tenu la pression, et c'est encourageant. Les trois plus aguerris ont réussi à s'extraire des qualifications pour décrocher chacun une finale par agrès : Léo Saladino et Jim Zona au sol, Cameron-Lie Bernard aux barres parallèles, qui n'avait pas prévu de disputer ces Championnats d'Europe après avoir échoué dans sa quête de quota olympique la semaine dernière à Doha, mais a été rappelé pour compenser l'absence de Benjamin Osberger, sérieusement blessé au genou.

« Rentrer à la place de quelqu'un qui avait une chance d'aller chercher un ticket, ça fait mal. Surtout Ben, insiste le Normand. Il ne méritait vraiment pas de finir les Coupes du monde comme ça. Ça a été ma motivation aujourd'hui. Je sais qu'il n'aurait rien laissé passer, et je me suis battu pour lui. » Maintenant, ces trois-là auront l'opportunité de jouer une médaille.

publié le 24 avril 2024 à 22h31
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