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Les livres à lire cet été

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L'été est le temps privilégié de la lecture et du cyclisme. Voici donc quatre ouvrages, qui naviguent entre histoire, littérature, sciences humaines et... guide pratique pour remonter en selle sitôt après la dernière page !

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Pierre Carrey « Giro », ed. Hugo Sport, 19,95€ (rayon : histoire)

Ça se passe comme ça, parfois : certains manques sont si énormes qu'on ne les aperçoit pas et, tout d'un coup, les voilà comblés de façon quasi-définitive. Il n'existait pas d'histoire complète du «Giro d'Italia» en langue française, mais déjà on sait que celle de Pierre Carrey fera date. L'énorme documentation mobilisée, et l'impressionnant travail de recoupement effectué par le journaliste de Libération, sont servis par une plume alerte et précise (comme on en connaît peu, en vérité).

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Au fil des pages, les anecdotes cyclistes (dont le livre regorge évidemment) s'articulent à l'Histoire et au territoire, et le lecteur comprend comment et pourquoi la politique s'empare du spectacle sportif ou de l'économie des corps. Aussi bien Victor-Emmanuel III que Mussolini, ou que le Vatican, ont cherché à utiliser la puissance symbolique d'un Giro devenu plus populaire en Italie que n'importe quel évènement. La «rivalité» avec le Tour de France n'est pas laissée de côté, et Pierre Carrey en précise la nature. Deux courses - deux «Grands Tours» - que tout incite à comparer et qui restent incomparables.

Le Giro et le Tour, c'est un format identique, certes, mais deux climats, deux styles, deux esthétiques et peut-être deux éthiques, deux cultures distinctes. Ce Giro est une somme et un texte magnifique, une lecture impérative d'ici au 6 juillet, ne serait-ce qu'au sens où il permet de prendre sur le Tour de France une perspective neuve.

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Grégory Nicolas - « Équipiers » - ed. Hugo Sport 17,50€ (rayon : littérature, "non fiction")

Comme écrivain, Grégory Nicolas aime à puiser dans la mémoire des familles. Filiation et transmission sont la trame de son travail. Une trame où vin et cyclisme se dessinent comme deux motifs majeurs enroulés l'un sur l'autre, et pour cause : l'arrière-grand-père tenait en Bretagne une gargotte ou Louison Bobet avait ses habitudes. L'amour du cyclisme plonge donc chez Grégory Nicolas des racines profondes, mais dont il a su garder toute la fraîcheur. Adolescent, il s'essaye à courir mais la domination outrageante du champion local, Perrig Quéméneur, contribue à le détourner, voire à le dégoûter pour un temps du vélo.

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Étudiant, il ne veut plus entendre parler cyclisme. Jusqu'au jour où une de ses cousines épouse un certain Pierre Rolland, et qu'il réalise combien son admiration des coureurs est restée vive. Quelques pros sont présents à la noce, que Gregory approche comme on aurait approché Elvis ou les Beatles. Et parmi ces dieux vivants, Perrig Quéméneur, avec qui il prend langue pour la première fois. C'est de cet échange qu'est née l'idée du présent livre, dédié à ces «Équipiers», ces hommes eux-mêmes dévoués à forger ces victoires qui ne sont pas les leurs, ces hommes qui font corps, entre eux et avec leur leader.

De fil en aiguille, Grégory Nicolas tissera des liens avec de nombreux pros français, jusqu'à accompagner l'équipe de France - cette dream team - au dernier Mondial d'Innsbruck. De C. Chevrier à Bardet en passant par Jimmy Turgis, Goeffrey Soupe ou Alaphilippe, il dresse une série de portraits authentiques et touchants, vibrants et purs comme l'admiration qu'il leur voue - et revendique - dans ce livre qu'on voudrait porter à sa bouche comme un verre d'eau fraîche en pleine chaleur.

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Jean Cléder - « Eddy Merckx, analyse d'une légende » - Mareuil Éditions, 22€ (rayon : sciences humaines)

Merckx, l'incomparable. Merckx, puissance iconographique : six lettres qu'on reconnaît comme une image ou un logo. Merckx, ce patronyme élevé au rang de nom commun, comme synonyme d'invincibilité. Merckx qui a gagné 625 courses professionnelles, toutes les plus grandes évidemment. Soulignons que c'est au sens authentique du terme pour une fois, qu'Eddy Merckx est une légende (de son vivant, qui plus est). C'est donc peu de dire qu'en 2019, il est devenu difficile d'éviter la redite, et qu'un livre sur le Cannibale se doit d'être singulier.

Jean Cléder, maître de conférence en littérature à l'Université de Rennes, relève le défi, à partir de la prémisse suivante : «Merckx» est aujourd'hui un ensemble de données informatives très diverses, qu'il se propose d'analyser pour déconstruire et ré-interpréter l'histoire.

L'auteur fait feu de tous matériaux : textuels, iconographiques (photos mais aussi dessins, caricatures, publicités, typographie même), audiovisuels, pour éviter de «réciter» mais plutôt «interroger» la légende. Le livre de Jean Cléder est un texte inclassable, situé entre littérature et sciences humaines, un brin exigeant mais novateur et passionnant. La question de savoir «de quoi Merckx est-il le nom ?» ne mérite-t-elle pas quelques efforts de concentration ?

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Claude Droussent - « L'Atlas du Vélo, augmenté par Strava » - ed. Solar, 24,90€ (rayon : guide pratique)

Ancien directeur de la rédaction de L'Équipe et de Vélo Mag, Claude Droussent entretient sans doute un rapport passionné avec le papier : après le papier bouffant du quotidien, et le papier glacé du magazine, il donne désormais dans le «beau livre». L'Atlas du Vélo ne fait pas exception à la règle, à ceci près que le papier y célèbre - et en prolonge les virtualités - une application digitale, la fameuse «Strava». Strava compte 40 millions de membres dont 2 en France. C'est un outil utilisé par les pros et les amateurs de tous niveaux. On y partage ses parcours et on y publie ses performances. Certes, on s'y compare, on s'y auto-sacre champion de sa rue, mais pas seulement.

Pour chacun des 250 parcours présentés, et classés par niveau de difficulté, le livre fournit donc le lien permettant d'en télécharger la trace GPX pour la transférer sur son compteur GPS : pratique. Même si les «segments» et les KOM ne sont pas oubliés, les itinéraires sont choisis selon des critères dépassant le seul intérêt sportif : l'auteur a pris soin de les émailler de «bons plans» utiles (magasins de cycles) mais aussi gastronomiques ou culturels. Par-dessus tout, ce que Claude Droussent met en exergue, c'est la formidable capacité d'une communauté comme Strava à «dénicher les beaux endroits». Ce guide très recommandable contribuera à grossir encore les rangs de ladite communauté, esthètes et athlètes confondus.

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publié le 7 juin 2019 à 13h52 mis à jour le 7 juin 2019 à 17h39
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